13 juil. 2012

Frank Ocean - Channel Orange



J’ai lu pas mal de reviews de cet album avant de me mettre à écrire la mienne, et la plupart étaient très justes, très enthousiastes mais dans chacune, une partie conséquente parlait de sa lettre sur son tumblr publiée il y a quelques jours au dépend de son album. J’ai trouvé ça sérieusement déplacé alors je voudrais juste vous faire partager quelque chose que j’ai lu et qui m’a paru le conseil le plus intéressant que je puisse vous donner avant d’écouter ce bijou : « Ocean isn’t a gay artist, he’s an artist » (djbooth.net).

Voilà, Channel Orange est donc le premier album de Frank Ocean, sa mixtape Nostalgie/Ultra avait fait de lui le seul concurrent valable de The Weeknd dans le Rnb actuel, cet album lui vaut (momentanément) le trône. Et il conquiert le trône car là où The Weeknd exprime sa noirceur avec un champ lexical relativement restreint, Frank Ocean est un vrai songwriter, ou plutôt un « storyteller ». On pouvait s’en douter rien qu’à l’écoute de ses lignes sur No Church In The Wild (Watch The Throne) : « What’s a king to a god ? What’s a god to a non believer ? » , 4 lignes plus percutantes que chacun des couplets de Kanye & Jay-Z. On aborde l’amour, les drogues, les jeunes et l’argent, enfin rectifions : nous, on se laisse plutôt guider pendant que Frank Ocean nous décrit sa vision de ces thèmes. Derrière son écran on a l’impression de se promener lentement en voiture des quartiers riches dans Super Rich Kids aux recoins les plus sombres de l’Arkansas dans Crack Rock, la musique nous expliquant ce qu’on est en train d’observer.

 L’album s’ouvre sur Thinkin bout you. Le titre était déjà sorti l’été dernier sur son tumblr, je pense que depuis vous avez pu constater la beauté et le romantisme de cette chanson, ouverture magistrale. Une interlude de 40 secondes à peine, Fertilizer avant de retrouver Sierra Leone, puis Sweet Life. Sweet Life ou encore Lost (un peu plus loin dans l’album) ont quelque chose d’ironique « Keepin' it surreal, My TV ain't HD, that's too real”. Il y décrit une vie douce, facile mais qui se passe dans l’ignorance, le superficiel. Ce constat continue avec Super Rich Kids où il est en featuring avec Earl Sweatshirt (l’enfant terrible d’Odd Future). Clairement une critique des jeunes fils à papa qui boivent « too many bottles of this wine we can’t pronounce ». Des considérations très superficielles qui amènent à dire « close your eyes for what you can’t imagine ». Pilot Jones suit, retour et vertiges de l’amour. Une histoire d’amour déçue mais qui continue grace ou à cause de la nostalgie, certains s’y reconnaitront surement.
 Crack Rock raconte ensuite tous les déboirs de drogue, redescente sur terre avant de repartir avec ce qui fut le premier titre officiellement sorti, Pyramids. Un OVNI de 10 minutes, 2 chansons en une, un titre implaccable qu’on garde en tête. La première partie ressemble à la descirption d’un rêve, une histoire d’amour avec Cleopatre, et au changement de beat , le retour dans la réalité, un club de strip tease. Une lenteur qui berce littéralement la deuxieme partie du titre, un des plus beau que j’ai pu écouter. Les morceaux suivants s’enchainent avant d’arriver à Bad Religion. Bad Religion est une confidence, le titre décrit sa difficulté à trouver une religion qui le laisse aimer l’homme qu’il aime. Laissez aux autres les polémiques sur sa pseudo islamophobie, Frank Ocean vient directement à vous, il n’y plus de limite entre l’artiste et le public sur ce titre.
Pink Matter suit, à peine le temps de reprendre son souffle. Le featuring avec Andre 3000 est magistral. Encore un titre sur l’addiction, mais à un amour, Andre 3000 et Frank Ocean éliminent la concurrence, chaque ligne est une citation potentielle, grandiose. Dernier arrêt de ce road trip émotif End/Golden Girl avec Tyler est le happy end qu’on attendait plus. Une histoire d’amour qui marche, mais bizarrement la chanson n’est pas très audible, un peu floue et vaporeuse, voire irréelle, le mystère clôture cet album.

 Vous l’aurez compris pour moi on a l’album de l’année, facile. Je n’ai pratiquement pas parlé avec des termes musicaux dont vous raffolez peut-être parce que si vous ne comprenez pas ce dont cet album parle, vous ne comprendrez pas les morceaux, l’intérêt et l’intensité des mélodies. La production de l’album, par Frank Ocean ou encore Pharell Williams sublime un talent immense, qui malgré les polémiques ou jugements sectaires qu’on pourra lui préter tous les deux jours, est inaliénable. Pour moi, livrer un album comme celui-ci au grand public est une preuve de confiance et de sincérité qui ne peut laisser insensible aucun amateur de musique.

A noter que Frank Ocean sera en concert à Rock en Seine le 24 aout.



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